Gardienne des mangroves, la communauté s’implique à fond dans la protection des ressources naturelles dans l’ouest de Madagascar

Speeches Shim

Lundi, 28 janvier, 2019
Des pêcheurs naviguent sur les eaux près de Kivalo
Photo: Bruno Rasamoel

La pirogue filait rapidement sur les eaux du grand chenal bordé de palétuviers, conduite de main de maître par le rameur assis à l’arrière de l’embarcation. Le matin était calme. Le seul son provenait du bruit de la pagaie dans l'eau et des cris sporadiques des oiseaux au-dessus de nos têtes, alarmés par notre intrusion.

Nous étions en route pour Kivalo, un village de pêcheurs sis à une heure de pirogue au nord de Mangily, à Morondava, dans la région du Menabe. Un peu plus de 60 cabanes composent le village qui n’est pas accessible par la route. Justin Rakotomanahira vit ici et préside le Vondron’Olona Ifotony (VOI) ou la communauté de base qui gère et protège les ressources locales, en particulier les mangroves.

Les mangroves autour de Kivalo sont divisées en plusieurs zones, dont six sont exploitées comme bois de feu et de construction par les membres de la communauté locale en vertu de ce qu’ils appellent le «droit d’usage.» Les zones restantes sont «ala faly», c’est-à-dire aires protégées en malagasy.

Selon Justin, certains riverains sont tentés d’exploiter les mangroves des «ala faly», mais les VOI, aidés par les garde-forestiers, veillent au grain. Les menaces existent toujours. D’anciens riverains qui ont quitté le village pour aller travailler ailleurs sont revenus à Kivalo après de mauvaises récoltes et se sont établis à la périphérie du village. Ils veulent exploiter illégalement les mangroves pour en faire du charbon de bois. Les VOI et les garde-forestiers ont pu attraper trois de ces contrevenants en 2018 avec 21 sacs de charbon et les ont remis à la police / au tribunal de Morondava. Ils ont également saisi 59 fours actifs en lisière de la forêt.

Le travail des VOI est risqué et ils craignent les représailles des contrevenants. Justin dit qu'un Dina (convention locale) est en vigueur dans le fokontany et que tous ceux surpris en violation de la loi se voient imposer une amende de 50.000 Ariary. Cependant, comme les tensions montent et les membres du VOI se sentent menacés, Justin décide en novembre dernier de demander aux autorités régionales de l’environnement de faire appel aux forces de l’ordre. Il indique qu'avec le soutien des forces, la situation est plus ou moins sous contrôle.

Les garde-forestiers communautaires aident à la  protection des forêts menacées
Les garde-forestiers communautaires aident à la protection des forêts menacées
USAID Madagascar

 

Quand on lui demande pourquoi lui et les membres de VOI continuent à protéger la forêt de mangroves malgré la menace des trafiquants, Justin répond : "Je protège mon pays et je n'ai pas peur de mourir." Les mangroves sont importantes pour les villageois car elles constituent une source de nourriture et de revenu. En effet, les mangroves servent non seulement d’habitat pour les crabes et les petits poissons que les gens capturent et vendent, mais elles offrent en même temps une protection contre les inondations et l’érosion, contribuant à la sécurité du village.

La communauté se met maintenant à l’écotourisme et à l’apiculture pour diversifier ses moyens de subsistance. Justin ajoute qu'il espère une amélioration de la situation à l’avenir et que c’est la raison pour laquelle il continue de sensibiliser la population à protéger et à préserver les ressources locales. Son épouse, Joséphine Raharinirina, craint pour la vie de son mari, mais pense que son travail est pour la bonne cause car il ne cherche qu’à améliorer la vie de la communauté.

Le programme environnemental USAID Mikajy financé par l'USAID débutera bientôt ses activités à Menabe. Le programme travaillera avec les communautés et appuiera les dirigeants locaux comme Justin pour préserver la biodiversité et créer de nouveaux moyens de subsistance durables en harmonie avec leur environnement.